
À moins de deux semaines de l’élection présidentielle prévue le 25 octobre 2025, le climat politique en Côte d’Ivoire s’est considérablement tendu. L’organisation Amnesty International a appelé, jeudi 16 octobre, les autorités ivoiriennes à « arrêter de réprimer les manifestations » et à libérer les personnes interpellées lors des récents rassemblements de protestation.
Dans un communiqué, Amnesty demande au gouvernement de protéger le droit de manifester pacifiquement, un droit fondamental garanti par les conventions internationales. L’organisation s’inquiète du durcissement sécuritaire observé ces derniers jours dans plusieurs localités, notamment dans le sud du pays, où l’opposition est fortement implantée. Les tensions ont été exacerbées par la disqualification de deux figures majeures de l’opposition – l’ancien président Laurent Gbagbo et Tidjane Thiam – dont les candidatures ont été rejetées par le Conseil constitutionnel. Cette décision a provoqué une vague d’indignation et de contestations, aussitôt jugées illégales par les autorités.
Selon des témoins et des sources sécuritaires, des manifestations et blocages de routes ont eu lieu lundi et mardi dans plusieurs villes. À Bonoua, un homme a été tué par balle par des « individus non identifiés », selon la police. Le Parti des peuples africains – Côte d’Ivoire (PPA-CI), dirigé par Laurent Gbagbo, accuse pour sa part les forces de l’ordre d’être responsables du tir. À Adzopé, le parti affirme qu’un bébé de moins de deux ans est mort « étouffé par les gaz » d’une grenade lacrymogène. Le week-end précédent, une grande marche à Abidjan, organisée par le Front commun – coalition regroupant le PPA-CI et le parti de Tidjane Thiam –, avait été interdite pour « maintenir l’ordre public ». Les forces de sécurité ont dispersé les participants à coups de gaz lacrymogènes. Les manifestants dénonçaient, entre autres, la perspective d’un quatrième mandat du président Alassane Ouattara.
D’après une source sécuritaire, 710 personnes ont été arrêtées entre samedi et dimanche soir. Le ministre de l’intérieur, Vagondo Diomandé, a justifié ces arrestations en déclarant que « ceux qui ont été pris dans le cadre d’une manifestation non autorisée répondront devant la loi ». Amnesty International exige la libération immédiate des personnes détenues pour avoir exercé pacifiquement leurs droits. Son directeur régional pour l’Afrique de l’Ouest et du Centre, Marceau Sivieude, a également demandé que tous les détenus puissent consulter un avocat et informer leurs familles dans les plus brefs délais.
On note en outre que les pressions s'accentuent afin que les autorités acceptent de rendre publiques les informations relatives aux arrestations et aux chefs d’accusation. Face à cette situation, l’opposition entend maintenir la pression. Le Front commun a annoncé une nouvelle marche nationale, dont la date reste à définir. Laurent Gbagbo, figure emblématique du camp opposé au pouvoir, devrait s’exprimer « dans les prochains jours », alors que le pays s’enfonce dans une crise politique préélectorale aux contours incertains.
